Pourquoi rester neutre émotionnellement quand on est dirigeant ?

Chef d’entreprise et émotions ne font généralement pas bon ménage (difficilement compatibles socialement parlant). Les émotions sont souvent associées à de la faiblesse, des problèmes de crédibilité, ou non conformisme par rapport aux attentes de l’environnement (clients, fournisseurs, salariés, entourage proche).

Montrer ses émotions pour un chef d’entreprise, c’est indiquer l’état de santé de celle-ci. La gestion des émotions devient donc complexe. Si le dirigeant va bien, l’entreprise va bien mais si le dirigeant va mal, c’est que l’entreprise va sûrement mal aussi. Compte tenu des responsabilités qui sont les siennes, le dirigeant ne peut pas toujours ressentir confiance, enthousiasme et sérénité face à l’avenir. Comme tout homme (ou femme), il a des problèmes mais ne peut pas forcément en parler autour de lui, ni en entreprise, ni au sein de sa famille. A-t-il finalement le droit de ressentir et de montrer ses émotions ?

Ressentir ses émotions et les accepter

Avons-nous le droit de ressentir des émotions ? En fait, il ne s’agit pas d’un droit mais d’un mécanisme humain au même titre que la fonction respiratoire. Les émotions font parties de nous et servent à notre survie. Elles sont là pour nous délivrer des messages sur la façon dont nous devons agir. Ressentir ses émotions, c’est accéder à des informations qui vont nous permettre de poser les bonnes actions pour faire face aux différentes situations de notre quotidien. Faut-il encore accepter l’information (et la forme sous laquelle elle nous parvient) et agir…

Montrer ses émotions ?

L’émotion est une réaction affective qui se manifeste par des mouvements neurovégétatifs comme pâlir, rougir, le pouls qui s’accélère… Ces réactions peuvent donc être perceptibles par notre interlocuteur. En effet, nous avons une capacité à ressentir les émotions des autres grâce aux neurones miroirs : les neurones miroirs permettent de simuler l’état émotionnel d’autrui dans notre cerveau et donc de mieux identifier les émotions éprouvées par les individus de notre entourage. Ne pas les montrer est donc parfois difficile.

Dans une relation, l’émotion est le lien. L’absence d’émotion est assimilée à de l’indifférence. Et il n’y a pas de relation dans ce cas. Les émotions vont induire des réactions chez nos interlocuteurs. Montrer ou non ses émotions dépend donc de l’impact probable que celles-ci vont avoir chez eux et des conséquences qui vont en découler. S’il est pertinent de montrer des émotions qui suscitent enthousiasme et confiance, il en est d’autres qui se révèlent contre-productives. Ce peut être le cas des émotions violentes comme la colère. Dans ce cas, il faut suivre l’adage « ne pas réagir à chaud » et essayer d’abord de comprendre pourquoi cette émotion s’exprime de cette façon et avec cette force. Très souvent, la colère indique que quelqu’un a violé une valeur importante à nos yeux. Il faudra donc en parler calmement et fixer des limites claires avec l’interlocuteur.

Pourtant, même les émotions désagréables et impactantes ont leur raison d’être. Elles ont besoin d’être exprimées pour maintenir le lien relationnel et rester « humain ». Savoir les verbaliser, les expliciter plutôt que de les montrer pour les faire subir aux autres, sera la clé pour aller vers des relations de qualité.

Les questions à se poser

  1. Quelle émotion suis-je en train de vivre ?   
    Par exemple : du découragement.
  2. Quel impact réel pourrait avoir cette émotion sur la relation ?       
    Cela pourrait entraîner la démotivation des personnes qui travaillent avec moi.
  3. Ai-je envie de subir ou de faire subir cette émotion ?         
    Non, ni pour moi, ni pour les autres.
  4. Si cette émotion était porteuse d’un message de changement, quel serait ce message ?
    De retrouver de la motivation en fixant de nouveaux objectifs motivants.
  5. De quelle manière puis-je exprimer ce que je ressens et le pourquoi de l’émotion tout en respectant l’autre et moi-même ?     
    En indiquant par exemple « je me suis beaucoup investi dans ce projet et les résultats ne sont pas à la hauteur de ce que j’en attendais. Je me sens découragé par cette situation. »
  6. Quelles actions dois-je poser en réponse à cette émotion ? 
    Prendre du recul pour redéfinir de nouveaux objectifs.

La communication non violente pour s’exprimer

La communication non violente a été élaborée par Marshall B. Rosenberg. Elle consiste à présenter à notre interlocuteur la situation factuelle qui nous pose problème et les émotions qui en découlent puis d’indiquer le besoin qui n’est pas satisfait pour terminer avec une demande afin que les choses évoluent.

Exemple : « Lorsque vous me demandez de faire encore un effort commercial alors que les prix que nous vous proposons sont déjà au plus bas, je ressens de la colère car j’ai l’impression que vous ne m’avez pas écouté quand nous avons évoqué le temps à passer sur ce projet. J’ai besoin de savoir si vous souhaitez réellement travailler notre entreprise et si ce contrat peut être établi de façon à ce que chacun y trouve son compte.« 

En conclusion

Ressentir l’émotion, c’est pouvoir accéder à l’information. Les accepter et les comprendre, c’est se donner les moyens d’agir de façon appropriée. Exprimer ses émotions tout en respectant l’autre, c’est donner du sens à la relation et lui permettre de gagner en qualité.

Que l’on soit dirigeant ou non, ressentir des émotions est normal et naturel. La posture de chef d’entreprise nécessite cependant de la mesure et de prendre en considération les interlocuteurs qui sont en face. La communication non violente peut être un excellent moyen de se respecter tout en tenant compte de l’autre (client, fournisseur, collaborateur, partenaire…) et du contexte.

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